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9 juin 2015 2 09 /06 /juin /2015 14:49

~~Hors prédiction.

Il y a quelques semaines dans un article publié dans Nature, les collaborations du détecteur CMS et du détecteur LHCb au CERN, révèlent la première observation d'une désintégration très rare de la particule méson B0s en deux muons. D'après les prédictions théoriques relatives au Modèle standard, modèle qui rend compte actuellement de la façon la plus satisfaisante l’ensemble des particules recensées, ce processus subatomique rare se produit quatre fois sur un milliard de désintégrations, mais il n'avait jamais été constaté auparavant. Ce résultat s'appuie sur des données prises en 2011 et 2012. Ces données contiennent également des indices d'une désintégration similaire, mais encore plus rare, celle du B0, une particule cousine du B0s, en deux muons

Ces résultats sont en accord avec les prédictions du Modèle standard. Doit-on s’en réjouir ? Oui ! Evidemment puisque ces résultats confirment la consistance absolue de ce modèle standard. Non ! Car l’horizon est bouché, ces désintégrations rares ne révèlent pas la moindre indication d’une nouvelle physique. Cela voudrait dire que ce Modèle Standard confirme des frontières de ses capacités de prédictions, comme si les physiciens avaient épuisé avec leurs outils théoriques propres à ce Modèle les ressources d’interprétation des concepts et des paradigmes attachés. L’ensemble de ces outils constitue la Théorie Quantique des Champs…à basse énergie.

Il n’est pas banal de constater que le livre datant de 2003, qui recense l’ensemble des résultats expérimentaux attendus au LHC : ‘La phénoménologie au LHC’ comprend, en fin d’ouvrage (420 pages), l’éventualité de ces désintégrations rares avec les probabilités de les observer. Ainsi se referme la boucle des prédictions, y compris les plus ténues.

On se souvient que la découverte du boson de Higgs, fut annoncé avec enthousiasme mais…en fait un enthousiasme relatif car il est tellement conforme, là encore, aux prédictions du Modèle standard que cela est troublant. Si on ne découvrait que ce que l’on cherchait ? Tout est tellement conforme. L’article ultime sur la désintégration du méson B est signé par 2500 physiciens, l’ultime sur la masse du boson de Higgs (février 2015) est signé par 5000 physiciens.

Dans la revue : ‘Le courrier du CERN’, le 09/04/2015, un article nous affirme à juste raison : « Les données du satellite Planck ne révèlent aucune évidence d’une nouvelle physique. La publication, des données de la mission complète du satellite Planck, est un évènement majeur de la cosmologie. En dépit de la très haute qualité des données, cet évènement a peu d’impact dans la communauté scientifique (sic). Plutôt que donner de l’élan pour une nouvelle physique, Planck confirme avec une grande précision le Modèle standard de la Cosmologie, annule la perspective de l’existence d’un neutrino, léger, stérile, et contredit l’espoir que l’excès de positron des rayons cosmiques ait comme origine la matière noire. »

De plus l’équipe de Planck a annoncé avec une ferme autorité scientifique le 06/02/2015 que les premières étoiles contribuant à la réionisation se sont allumées 550 millions d’années après le big-bang et non pas 400 millions comme on croyait avoir observé grâce au télescope Hubble.

Ainsi, il semblerait que nous ayons obtenu de la part des deux Modèles Standards tous les résultats que nous avions anticipés, avec une précision étonnante, mais pas plus, ni la moindre indication concernant un au-delà de ceux-ci.

Depuis quelques jours, nous avons une grande perspective grâce au redémarrage du LHC, largement amélioré et avec des détecteurs reconfigurés. A priori, on devrait détecter des productions qui constitueraient au moins des indices qu’un au-delà à chacun des modèles standards est crédible. L’espoir largement exprimé est que l’on découvre, par exemple, enfin des particules supersymétriques qui comprendraient la découverte de particules de matière noire. Ces résultats on est prêt à les observer parce qu’ils sont exactement dans le prolongement de ce que l’on maîtrise à propos des modèles standards. Sans vouloir jouer les Cassandre, il y a un risque certain de distorsion, et de laisser de côté des découvertes authentiquement originales.

En effet, étant donné la ‘grande’ science qui est programmé au CERN, il est très difficile de laisser de la place à de l’inattendu. Tout est préétabli, tout est préalablement simulé, et dans les détecteurs ne sont sélectionnées que les traces des évènements attendus. Entre la première séquence d’exploitation du LHC jusqu’en 2013 et la deuxième séquence qui vient de démarrer, il n’y a rien de neuf du point de vue théorique, pas de concept nouveau, encore moins de paradigme nouveau. Si on ne voit pas de particules supersymétriques donc corrélativement pas de particules de matière noire telles qu’elles sont préalablement conçues cela provoquera un très grand désarroi.

Ce qui à mon sens est à l’origine de cette perspective déroutante mais concevable, c’est que les physiciens théoriciens sont convaincus qu’ils disposent avec la ‘Théorie Quantique des Champs’ (TQC) de l’outil universel permettant de traiter de tous les problèmes de la physique des hautes énergies actuelle. Il n’est donc pas impossible que cela induise un tropisme qui nous rende aveugle intellectuellement à l’égard d’évènements hors TQC. Rappelons-nous, lorsque fut annoncée, l’an passé, la détection des ondes gravitationnelles primordiales du Big-Bang, c’est la thèse d’Andreï Linde avec l’inflaton : champ quantique inducteur de l’inflation, qui a refait surface, jusqu’à ce que la baudruche se dégonfle.

Heureusement que des très grandes quantités de données sont enregistrées, ce qui permettra des retours en arrière sur les années du run : 2012, 2013, dès qu’on aura pris conscience de notre aveuglement théorique.

A mon sens il faudrait dépasser la TQC, pour ouvrir vraiment des nouvelles perspectives d’une nouvelle physique et non pas nous cantonner à chercher ce qui pourrait constituer ses prolongements. Autrement on risque, dans les deux ou trois prochaines années, de n’avoir qu’à contempler la justesse des prédictions du Modèle Standard tel que nous l’avons prospecté jusqu’en 2013. Les failles de la TQC sont décelables à propos des neutrinos, dont on cherche depuis 80 ans à saisir les propriétés physiques dans ce cadre alors qu’on devrait concevoir une physique spécifique des neutrinos.

Il y a des domaines où il est envisageable que des découvertes déverrouillent la situation, et c’est peut-être à la portée de la nouvelle session au LHC d’ouvrir cette perspective. Etant donné le niveau d’énergie atteint dans le centre de masse des collisions des protons, il y aura peut-être formation de micro-trous noirs qui seront détectables par la formation de photons résultants de leur évaporation. Dans ce cas l’hypothèse de petites dimensions spatiales (ou 4, ou 6) deviendra crédible et partant nous mettrons en évidence un authentique paradigme nouveau. La conception d’une nouvelle physique serait immédiatement à notre portée. Cela impliquerait une modification maîtrisable de la loi de Newton aux très petites dimensions (de l’ordre de 10-10m), ainsi que notre représentation actuelle des particules élémentaires. Il ne faut pas oublier d’indiquer que cela validerait aussi les travaux de S. Hawking.

Ce qui est hors prédiction voire insolite, à condition que nous soyons disponibles pour le déceler, pourrait donc nous offrir des bifurcations qu’il nous faudra savoir exploiter.

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