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28 juillet 2015 2 28 /07 /juillet /2015 11:04

~~C’est exactement une bévue.

Lorsque j’ai posté l’article : « Une étonnante régression », le 28/02/2015, j’étais troublé. Trouble provoqué, à la lecture de ‘Par-delà le visible’ de C. Rovelli et qui ne s’est pas depuis dissipé. Aussi, j’ai prolongé l’analyse de ce livre avec quelque part le secret désir de considérer que je n’avais pas tout bien compris. Je me suis concentré sur l’exploitation de la théorie de l’information qui est proposée, acceptant l’idée a priori que cette thèse pouvait apporter de la valeur ajoutée à une meilleure compréhension (si cela est nécessaire) de la mécanique quantique.

Lorsque C. Rovelli écrit, p. 228 : « Toute la structure de la mécanique quantique peut être lue et comprise en termes d’information de la façon suivante. Un système physique se manifeste seulement et toujours en interagissant avec un autre. La description d’un système physique est donc toujours faite par rapport à un autre système physique, celui avec lequel le premier interagit. Toute description de l’état d’un système physique est donc toujours une description de l’information qu’un système physique a d’un autre système physique, c’est-à-dire de la corrélation entre les systèmes. Les mystères de la mécanique quantique deviennent moins épais si nous l’interprétons de cette façon à savoir comme la description de l’information que les systèmes physiques ont l’un de l’autre. » Dans ce paragraphe, il y a une omission étonnante de la part de l’auteur, c’est que la description effective d’un système physique quantique ne peut être obtenue qu’à partir d’une interaction avec un système physique macroscopique. Ceci est incontournable car il n’y a pas de manifestation ni de description effective sans observateur, qui est un être classique. L’observable quantique est obtenue au moyen d’un instrument qui est conçu grâce à l’ingénierie et au savoir-faire classiques des physiciens. Avec le processus de la mesure (de l’observation) nous sommes dans un processus univoque. C’est l’observateur qui prélève de l’information sur le système quantique déterminé par l’observateur (voir la mesure du spin, par exemple). Pour l’observateur, cette observation fige ensuite le système dans l’état qui a donné la valeur de la variable quantique (voir l’intrication, par exemple). Depuis la fondation de la mécanique quantique nous n’avons acquis aucune connaissance nouvelle qui nous permettrait d’extrapoler et d’attribuer une valeur universelle à cette affirmation de C. Rovelli : « Toute description de l’état d’un système physique est donc toujours une description de l’information qu’un système physique a d’un autre système physique ».

A propos du terme information, je pense que nous avons à faire essentiellement à un glissement sémantique qui n’offre pas de valeur ajoutée à la compréhension que nous pouvons avoir à l’égard de la mécanique quantique. La connaissance de la valeur d’une grandeur quantique est une information obtenue par le sujet pensant, que dire de plus. Depuis le début de la mécanique quantique l’objectif des physiciens est donc de recueillir de l’information sur les systèmes quantiques qu’ils déterminent.

Cette banalisation que je propose du mot : information, n’est évidemment pas partagée par Rovelli, car on peut lire, p.224 : « Pourquoi la notion d’information est-elle utile, et peut-être même fondamentale pour comprendre le monde ? Pour une raison futile (sic) : elle mesure la possibilité des systèmes physiques de communiquer entre eux. » Cette affirmation de l’auteur est une conviction mais en aucun cas ne peut être considérée, jusqu’à présent, comme l’énoncé de ce que l’on pourrait considérer comme la source d’un paradigme nouveau qui permettrait de franchir un cap jusqu’alors inconnu de la connaissance scientifique. Dans le premier article j’ai évoqué une régression car si on suivait l’auteur, se développerait la croyance que le monde naturel a un comportement propre absolu, qu’il serait mû par une dynamique propre et finalement nous en aurions la connaissance objective.

Je ne trahis pas l’auteur en affirmant que c’est cette conception-là qui prévaut chez lui, p.225 : « La façon dont les atomes se disposent peut être corrélée à la façon dont d’autres atomes se disposent. Et donc, un ensemble d’atomes peut être porteur d’une information, au sens technique et précis décrit plus haut, sur un autre système.

Cela, dans le monde physique, se produit sans arrêt et partout, à chaque instant et en chaque lieu : la lumière qui parvient à nos yeux transporte de l’information sur les objets dont elle provient, la couleur de la mer donne une information sur la couleur du ciel au-dessus d’elle, une cellule possède une information sur le virus qui l’a attaquée, un nouvel être vivant est riche d’information car il est corrélé (sic) à ses parents et à son espèce…

Le monde ne se réduit donc pas à un réseau d’atomes qui se rencontrent : il est aussi un réseau de corrélations entre des ensembles d’atomes, un réseau d’information réciproque entre des systèmes physiques.

Dans tout cela, il n’y a rien d’idéaliste ni de spirituel (pourquoi devoir le préciser ?) ; ce n’est qu’une application de l’idée de Shannon selon laquelle on peut compter les alternatives. Mais tout cela est une partie du monde comme les pierres des Dolomites, le bourdonnement des abeilles ou les vagues de la mer.

Une fois compris que ce réseau d’informations réciproques existe (sic) dans l’Univers, il est naturel d’essayer d’en tirer profit pour décrire le monde… »

Avant tout, je dis qu’il est extrêmement choquant et inapproprié d’utiliser le terme corrélation indistinctement pour évoquer l’interdépendance qui pourrait prévaloir dans le monde inerte ainsi que dans le monde vivant. Ici, à ce degré, on ne peut pas excuser un raccourci, cela met plutôt en évidence une tambouille intellectuelle inacceptable.

Avec ce paragraphe cité, on constate que Rovelli qui attribue à notre œil, donc à notre cerveau, par exemple, la faculté d’interpréter la couleur de la mer via un processus de décryptage vaut identiquement pour le monde inerte atomique ??? Soit il nie la spécificité du monde vivant et en l’occurrence du ‘sujet pensant’, soit il dote le monde matériel inerte d’un dessein.

Basiquement, voyons d’où vient l’idée que la théorie de l’information selon Claude Shannnon pourrait être exploitée en physique… quantique. P.222 : «Avant tout, qu’est-ce que l’information ? le mot est employé dans le langage courant avec une grande diversité de sens, ce qui est aussi une source de confusion dans son usage scientifique (sic). La notion scientifique d’information a été définie par Claude Shannon, mathématicien et ingénieur américain, en 1948 : l’information est une mesure du nombre d’alternatives possibles pour quelque chose. Par exemple, si je jette un dé, celui-ci peut tomber sur six faces. Si je vois qu’il est tombé sur une face particulière, j’ai une quantité d’information N = 6, car il y avait six possibilités. Si je ne sais pas quel jour est ton anniversaire, il y a 365 possibilités différentes. Si tu me dis quel jour est ton anniversaire, j’aurai une information N = 365, etc. (L’information ne mesure pas ce que je sais, mais le nombre d’alternatives possibles. L’information qui me dit qu’est sorti le numéro 3 à la roulette est N = 37, car il y a 37 numéros…)

Au lieu du nombre d’alternatives N, il est plus commode, pour indiquer l’information, d’utiliser le logarithme en base 2 de N, appelé S. l’information de Shannon est donc S = log2N, où N est le nombre d’alternatives. De la sorte, l’unité de mesure, S = 1, correspond à N = 2, c’est à dire à l’alternative minimale, qui comprend seulement deux possibilités. Cette unité de mesure est l’information entre deux alternatives et elle est appelée « bit ». Quand je sais qu’à la roulette est sorti un numéro rouge au lieu d’un noir, j’ai un bit d’information : si je sais que c’est rouge-pair qui est sorti, j’ai deux bits d’information ; si c’est un rouge-pair-manque, j’ai trois bits d’information. Deux bits d’information correspondent à quatre alternatives (rouge-pair, rouge-impair, noir-pair, noir- impair)… »

Ensuite, p.223 (à lire), l’auteur développe un exemple pour justifier l’idée d’information corrélée. Son exemple est très déterminé et au-delà, il n’a aucune validité générale, à moins de partager le réductionnisme de Rovelli.

La théorie de l’information proposée par Shannon est conçue étant donné qu’une communication est établie. Elle est donc typée. Je cite, p.223-224 : « Shannon, qui a inventé la théorie de l’information, travaillait dans une compagnie de téléphone, et cherchait le moyen de mesurer avec précision ce que pouvait « transporter » une ligne téléphonique. Que transporte donc une ligne téléphonique ? Elle transporte de l’information. Elle transporte une capacité de distinguer deux alternatives. C’est pourquoi Shannon a défini l’information. » Il est donc difficile de considérer que cette théorie ait une valeur au-delà de ce contexte spécifique et encore moins considérer qu’elle peut indiquer quand il y a communication ou pas.

Je suis tellement désappointé que je préfère faire mon propre mea culpa et essayer l’humour pour masquer ma déception. Je ne devrais avoir rien à reprocher à C. Rovelli, car le titre de son livre est : ‘Par-Delà Le Visible’. C’est donc un voyant qui a écrit le livre et non pas un physicien, je suis de fait responsable de ma bévue. S = 1, chez l’auteur, N = 2, il y a deux possibilités, l’une est le voyant, l’autre est le physicien. Nous avons donc à faire à un cas exceptionnel, comprenant ces deux états antagoniques qui pourraient être superposés et représentés par une même fonction d’onde avant sa réduction. Le livre est comme un instrument de mesure qui a réduit la fonction d’onde dans l’état : voyant.

De tout ceci il faut en débattre, ce livre est donc à lire.

N.B. Que des physiciens éprouvent le besoin et…l’utilité de proposer des coups de projecteur d’anticipation s’appuyant sur leur propre intuition est une bonne chose. Certes, c’est un exercice risqué, mais ceci n’a de valeur que si cela s’appuie sur les connaissances existantes consistantes respectées, si la rigueur des résultats consolidés est prise en compte. Dans ce cas les propositions anticipatrices de ces physiciens éclairés peuvent avoir de la valeur et conséquemment ouvrir des horizons prospectifs nouveaux.

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