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14 mai 2019 2 14 /05 /mai /2019 16:13

Chemin escarpé menant à un au-delà de la Relativité Générale

Depuis le 1er Avril les deux détecteurs d’ondes gravitationnelles, l’un américain Ligo, l’autre européen Virgo, ont été simultanément remis en activité avec un gain de sensibilité respectif de l’ordre de 50%. Cette Collaboration Ligo Virgo (CLV) prévoit, grâce à ce gain de sensibilité remarquable, de détecter de l’ordre de 4 collisions-fusions de trous noirs par mois et une collision-fusion d’étoiles à neutrons par mois. Ce run 3 d’activité sur un mois, qui est programmé pour durer une année complète, a confirmé ces prévisions. Si ce résultat n’est pas le fait du hasard, cela est intéressant car grâce aux résultats des runs 1 et 2 ainsi que les prévisions des théoriciens on a déjà une idée de la densité dans l’univers local de ces objets célestes qui peuvent faire vibrer les interféromètres.

Le 25 avril, un signal significatif correspondant à la fusion de 2 étoiles à neutrons a été réceptionné par CLV située à environ 500 millions d’années-lumière. Les équipes étaient encore mobilisées sur cet événement que le lendemain un nouveau signal gravitationnel modifiait la position des miroirs des interféromètres de 10-19m environ. A première vue ce signal à l’aspect inattendu semblait annoncer une collision mixte c’est-à-dire entre un trou noir et une étoile à neutrons. L’enthousiasme immédiat des équipes provoqué par cette signature inattendue mais très intéressante a baissé d’un cran parce qu’un des bras de Ligo était en stand-by pour cause de réglage et en conséquence la localisation spatiale probable de cet événement devenait très imprécise. Or cet événement quand il a lieu est à coup sûr multimessages. Encore faut-il que les télescopes recueillant les ondes électromagnétiques correspondantes, d’une gamme étendue de fréquences, puissent être orientés dans la bonne direction en quelques fractions de seconde. Actuellement aucune des équipes travaillant sur les télescopes en question n’ont annoncé avoir enregistré quelque chose de significatif en rapport avec l’alerte du 26 avril. Malgré tout, il est toujours considéré qu’une collision mixte a eu lieu a 1,2 milliards d’années-lumière mais la dimension multimessages n’a pas pu être mise à profit.

Rappelons qu’un événement multimessages permet d’analyser les ondes gravitationnelles spécifiques de la collision ainsi qu’analyser les ondes électromagnétiques produites par celle-ci et la durée d’observation peut être prolongée de plusieurs jours avant que le produit final de la collision ne devienne noir.

Lorsque nous sommes en mesure de pouvoir déceler la collision de 2 trous noirs, les ondes gravitationnelles recueillies par l’interféromètre sont la seule source de décryptage de l’événement. La classification de celui-ci est obtenue avec l’exploitation d’une base de données de calibres. Ceux-ci sont conçus préalablement grâce l’exploitation des équations de la Relativité Générale donc ils sont représentatifs de ce que la R.G prédit. L’opération d’identification par calibrage présente donc le risque d’être au moins réductrice sinon erronée car actuellement nous ne savons pas si la R.G. est valable pour décrire ce type d’évènement, même approximativement. Nous n’avons pas d’autres moyens pour identifier ces collisions car aujourd’hui aucun autre moyen théorique n’a été mis à jour depuis 1915. L’espoir est donc, grâce à la multiplication d’observations de collisions de trous noirs, empiriquement, on finira par constater des écarts entre prédictions et observations effectives. Plus on enregistrera de données plus le chemin de constats d’écarts sera traçable. De plus on peut émettre l’hypothèse qu’à la force de l’habitude les équipes travaillant sur ce sujet gagneront de la capacité d’analyse des ondes gravitationnelles de plus en plus aigüe et différencieront progressivement ce qui est de l’ordre du prédictible et ce qui est de l’ordre de l’authentiquement nouveau.

Ce qui est à l’ordre du jour c’est donc de trouver un chemin qui nous mènera au-delà de la Relativité Générale car nous n’avons jusqu’à présent aucun paradigme nouveau qui permet de concevoir par anticipation cet au-delà. C’est un chemin par petit pas que nous devons emprunter et effectivement nous avons de bonnes raisons de penser qu’avec ces extraordinaires évènements, que nous sommes capables de détecter depuis 2016, une première fenêtre est entr’ouverte. Entrouverture parce que la seule détection de fusions de trous noirs telles que celles qui ont été enregistrées sont relativement pauvres en informations. En effet les trous noirs sont des objets célestes qui sont caractérisés par des paramètres intrinsèques limités : leur masse certes et aussi leur spin de rotation. La collision de 2 de ces objets produit finalement, instantanément, un objet semblable avec une masse double moins une ou deux masses solaires, voire plus, qui se transforment en énergie de rayonnement gravitationnel qui porte jusqu’aux détecteurs terrestres la perturbation de l’espace-temps.

Heureusement qu’il est possible d’enrichir ces données avec celles enregistrées lors de collisions d’étoiles à neutrons comme ce fut le cas en 2017. Certes elles sont moins massives, de l’ordre de 2 à 3 masses solaires contre 20 jusqu’à 50 pour les trous noirs présentement détectés, mais du fait qu’il y a émission de rayonnement électromagnétique en accompagnement du rayonnement gravitationnelle dans une large gamme : ondes radios jusqu’aux rayons gammas, la richesse des informations recueillies permet, en plus de constater la validité ou pas de la R.G., d’évaluer par contraste ce qui différencie trous noirs et étoiles à neutrons. En effet l’état de la matière dans une étoile à neutrons est l’ultime état ‘connaissable’ avant celui totalement inconnaissable d’un trou noir. D’ailleurs, finalement, l’ultime objet céleste résultant de la fusion de 2 de ces étoiles est un trou noir et si on pouvait capturer quelques indices résultant de cette transformation ce serait remarquable.

Il est clair que c’est l’évènement collision-fusion de 3e type c’est-à-dire : trou noir étoile à neutrons, qui pourrait nous éclairer au mieux de ces situations physiques extrêmes. A priori la traçabilité de l’événement est envisageable car l’étoile à neutrons émet du rayonnement. Ensuite, l’étoile de ce type ne fait pas le poids à l’égard du trou noir qui l’attire, ainsi jusqu’à un certain point, la géodésique du mouvement de celle-ci est celle imprimée par le trou noir et à cette occasion on pourrait mieux comparer géodésique prédite par la R.G. et la trajectoire effective avant absorption. De plus à cause de la disparité des masses en présence on peut prévoir que la matière de l’étoile se sépare par lambeaux du corps central et en plus de son rayonnement électromagnétique qu’on pourrait observer on pourrait mieux identifier la nature de l’état de cette matière.

Grâce à Hulse et Taylor, deux astrophysiciens américains, qui ont découvert le pulsar PSR B1913+16 (2 étoiles à neutrons en mouvement de rotation l’une par rapport à l’autre) en 1974 et qui l’ont étudié très précisément (prix Nobel 1993) avec les équations de la R.G. on sait que ces équations d’Einstein sont quasiment exactes pour ce type d’objets célestes. Si avec l’étude des trous noirs dans le cadre d’évènements du 3e type on trouve des écarts significatifs avec la R.G. nous pourrons connaitre le seuil de transition à partir duquel la R.G. perd de sa capacité de prédiction qui devra ainsi être modifiée voire invalidée.

La découverte d’un seuil de transition constituerait un indicateur mais ne nous fournirait pas pour autant la clé de l’au-delà de la Relativité Générale. Par contre les tenants de la théorie des cordes ou de la gravité quantique à boucles disposeront d’un territoire de données observées qui permettra de mettre à l’épreuve une correspondance ou pas entre ce que prédisent leurs théories et ces données observées.

Ce qui est à mes yeux le plus probable c’est de devoir se préparer à progresser en terra incognita, ce qui constitue une perspective hautement intéressante mais aussi redoutable car il est à craindre que ni la gravité à boucles ni la théorie des cordes ne nous offre un ancrage au-delà de la Relativité Générale.

 

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