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3 juin 2022 5 03 /06 /juin /2022 15:21

Au cours des semaines à venir je propose de publier un ensemble de textes sous le titre générique : « L’Être humain est une Réalité de/dans l’univers ».

Une fois par semaine j’éditerai une suite à ce que j’aurai publié la semaine précédente.

Le mémoire complet représente actuellement 70 pages. Il comprend 4 chapitres :

1 Prologue

2 Présence

3 Dialogue imaginaire avec Carlo Rovelli

4 A sein d’une Eternité parmi Tous les Possibles…

Ci-joint la publication du 03/06/2022

L’Être humain est une réalité de/dans l’Univers

                                                                    Prologue

Après avoir lu et relu le livre d’Adam Becker : « What is Real ?», sous-titré : « The unfinished quest for the meaning of quantum physics » ; soit : « Qu’est-ce qui est Réel ? » ; sous-titré : « La quête infinie de la compréhension de la physique quantique », j’ai considéré qu’il était temps pour moi d’entreprendre l’écriture de ce mémoire dont son titre affirme que le centre de la scène de la connaissance en physique, qu’elle soit physique quantique ou physique classique, est occupé par l’être humain fondateur de cette science. Avec cette hypothèse, il faut tenir compte du fait qu’il est imprégné de ses propres déterminations actuelles, que celles-ci soient, entre autres, ses encore ignorances, ses connaissances partielles et/ou approximatives, ses incapacités actuelles à se poser les bonnes questions, ainsi que l’écran de sa subjectivité riche de croyances ataviques. L’être humain doit être considéré comme la première réalité à l’origine de l’émergence des autres réalités qu’elles soient de l’univers ou dans l’univers, elles sont donc ses propres réalités[1].

Quelques temps auparavant j’avais lu le livre de Philip Ball : « Beyond Weird », sous-titré : « Why everything you thought about quantum physics is different ?” ; soit : « Au-delà de l’Etrangeté » ; sous-titré : « Pourquoi tout ce que vous pensez à propos de la physique quantique est différent ? », ainsi que le troisième livre du même acabit de Sean Carroll publié une année après en 2019, « Something Deeply Hidden », sous-titré : « Quantum Worlds and the Emergence of Spacetime » ; soit : « Quelque chose Profondément Caché » ; sous-titré : « Les Mondes quantiques et l’Emergence de l’Espace-Temps ».

Ces trois livres commentent une fois de plus les problématiques fondamentales qui ont surgi avec l’avènement de la mécanique quantique et des relativités restreinte et générale au début du vingtième siècle. Avènement qui fut sujet de débats de très grandes qualités tout aussi bien d’un point de vue scientifique, épistémologique, que philosophique jusqu’avant le début de la deuxième guerre mondiale car la montée du fascisme a provoqué la très regrettable dispersion de très grands intellectuels scientifiques européens à l’origine de cet ensemble de découvertes. Commenter et reconstituer l’histoire du développement de la connaissance en physique du vingtième siècle est une chose certainement utile mais cela est surtout de nos jours, puisque c’est la énième fois, le symptôme d’une extraordinaire et inquiétante actuelle stagnation de la connaissance en science physique fondamentale.

Je me suis décidé à écrire ce mémoire à thèse qui vise à proposer une conception de la physique qui permettrait, non pas de regarder dans le rétroviseur, mais de porter notre regard de chercheur en physique vers l’horizon de découvertes nouvelles qui feront avancer nos connaissances fondamentales sur le monde physique.

Mon hypothèse c’est que depuis le 17e siècle, depuis Galilée (1564-1642), les physiciens ont emprisonné leur pensée dans la croyance qu’ils étaient à même d’accéder à une connaissance Universelle, qui serait aboutie, c’est-à-dire une connaissance globalement et finalement exacte, polarisée par la croyance que l’objectivité rendant compte du monde réel est effectivement accessible à l’intelligence humaine. Ce serait donc une connaissance qui serait le fruit d’une complète réduction des déterminations de celui qui est l’auteur de la connaissance c’est-à-dire celui qui est reconnu avoir le statut de physicien. J’ai parfaitement conscience que le titre de ce mémoire peut être considéré provocant surtout si on se réfère au paradigme épistémologique toujours dominant. Paradigme qui exclut que la présence du sujet pensant, avec ses déterminations, même à l’état de trace, puisse être prise en considération dans les bonnes lois et propriétés actuelles de la physique.

Les lecteurs constateront que je cite de nombreux auteurs, tout au cours de ce mémoire, car ma conception ne m’est pas complètement propre, elle n’est pas le fruit de la réflexion d’une personne solitaire. Au contraire, j’étudie, tresse ma pensée avec celle des autres et je ne cesse pas de confronter mes propres hypothèses depuis une vingtaine d’années, à une multitude de propositions, de publications, d’ouvrages, qui me permettent de façonner et d’affiner une conception globale personnelle du monde physique qui se justifie donc au fil d’une interaction entretenue avec des membres de la communauté des physiciens avec lesquels je reconnais des convergences tout autant que des divergences. Cela ne peut pas être autrement.

Une compréhension interactive entre les différentes conceptions ainsi que l’analyse de leurs interprétations sont absolument nécessaires pour entretenir une pensée en mouvement et en progrès. Bref, dans ce contexte, le concept d’intelligence collective, à mes yeux, n’est pas vain. En conséquence un dialogue permanent, qui peut être réel ou imaginaire avec ceux qui proposent, est impératif et peut s’avérer particulièrement fructueux.

Bien que je fasse état dès les premières lignes du Prologue d’une sérieuse inquiétude à propos d’une véritable inertie intellectuelle qui rend incapable, la communauté des physiciens, depuis une bonne trentaine d’années, de produire des nouvelles idées fondatrices en physique, il y a quand même matière à espérer car il commence à y avoir de la révolte dans l’air. A ce titre le livre de Sabine Hossenfelder, en 2019 : « Lost in Maths », soit : « Perdus en Mathématiques », sous-titré : « Comment la beauté égare la physique. » doit être considéré comme un très sérieux premier coup de semonce adressé aux physiciens théoriciens pour qu’ils sortent de leur torpeur, en quelque sorte qu’ils sortent de leurs paradigmes épuisés.  Dans la quatrième de couverture, sans détour, Hossenfelder est conduite à constater ce bilan radicalement négatif : « Pourtant les théoriciens sont persuadés (sic) que leurs gracieuses équations et leurs formules élégantes recèlent de formidables vérités sur la nature. Résultat, la discipline est aujourd’hui dans l’impasse. » Quand elle interroge Gian Francesco Giudice, membre de la division Théorie du CERN à Genève, sur ce qu’il pense en 2019 des dernières données fournies par le LHC, il lui répond : « Nous sommes complètement perdus. » Enfin, pense-t-elle : « Quelque chose que je comprends. »

Dans le prologue je privilégie les références à des auteurs qui plus ou moins incidemment expriment des idées qui côtoient celles qui ont ma préférence et que je tente de développer. Ainsi je tente de recenser les expressions des physiciens et des philosophes des sciences qui visent à desserrer l’étau des contraintes qui pour l’essentiel structurent la pensée et les raisonnements en jeux. Contraintes entretenues par ceux qui se reconnaissent ou s’invitent dans la communauté des physiciens et contribuent à garantir la croyance que leurs connaissances sont véritables et ont une valeur universelle.

J’ai déjà eu l’occasion de lire en 2012 : « Le physicien est convaincu qu’un monde extérieur à lui existe. C’est un postulat métaphysique ; ce n’est pas une donnée empirique. On pourrait tout autant postuler que le monde n’est pas et que nous sommes trompés par nos sens. La physique est une construction humaine qui ne dit pas l’absolu vérité du monde. La science n’a jamais prétendu dire la Vérité, hormis dans le scientisme que je tiens pour une forme de théologie. » L’auteur de cette considération tranchante : M. Blay, à ma connaissance, n’a jamais donné suite ou n’a jamais pu donner suite à son analyse. Il aurait donc parler dans le désert ou bien lui-même cherchant une chute pour son article a sélectionné, sans trop croire à une possibilité de suite, cette ruade épistémologique.

Ce qui est signifié dans la citation ci-dessus, qui à mes yeux est approprié, peut être endossé et développé par d’autres physiciens qui auraient semble-t-il intégré, d’une façon permanente dans leurs productions professionnelles, l’idée que la connaissance en physique n’en demeure pas moins humaine et créée. Ainsi dans le petit livre de Aurélien Barrau (2016), qui n’est pas destiné s’adresser explicitement à la communauté scientifique : « De la Vérité dans les Sciences. », on peut lire page 36 : « Mon ami Carlo Rovelli, inventeur de l’une des meilleures théories de gravitation quantique – considère que la science c’est « un peu d’air frais qui entre dans la maison ». Il n’est plus seulement question de s’émerveiller devant nos propres créations mais aussi devant ce qui semble exister et se déployer indépendamment de nous. Je pense qu’il a raison. Il est sain, voire salutaire, de souligner cela. Mais il ne faut pas oublier, en parallèle de cette mise en rapport avec l’autre, avec l’ailleurs, avec l’hors, que nos manières d’appréhender cet « autre part » n’en demeurent pas moins humaines et créées. Il faut rester conscient (sic) que cette tentative d’exploration du loin n’est entreprise qu’avec nos modalités purement et inéluctablement humaines et donc locales. Nous choisissons et inventons les rapports au(x) monde(s) que nous jugeons pertinents. Ils ne sont pas donnés, ils sont construits. »

Selon ce que nous dit Barrau, si je comprends bien, c’est que nous devons rester lucide sur le fait que nous mettons en œuvre des moyens qui sont propres à notre nature humaine pour décrypter, l’ailleurs, l’hors. Ces moyens sont déterminés par ce qui fait de nous des êtres humains réflexifs. Ces moyens ne peuvent pas être considérés comme universels, ils nous sont attachés. Ce qu’il confirme à la page suivante : « La science est une louable tentative d’accéder au non-humain-du-réel – elle est toujours consciente – elle devrait en tout cas l’être (sic) – de ses limites. Limites omniprésentes ! »

Pour moi les limites omniprésentes sont celles que je désigne, en introduction, comme étant les déterminations qui nous habitent et font écran au dévoilement de connaissances de la nature qui seraient universelles s’il en est. Certes, elles sont omniprésentes, mais elles évoluent. Je ne prends aucun risque en affirmant que les déterminations qui imprégnaient le ‘sujet pensant’ (le monde de la physique) à l’époque d’Isaac Newton et de René Descartes ne sont plus les mêmes que celles d’aujourd’hui.

Je veux avant tout, remercier Aurélien pour ce qu’il nous dit car cela met en évidence une vraie honnêteté intellectuelle et un refus de l’enfermement de sa pensée dans un cheminement univoque. Effectivement, il ne se repose pas, sans cesse il explore. Ceci ne fait pas de doute ! Ce que je souhaite c’est que les différents chemins d’explorations qu’il parcourt se fondent en un seul chemin celui correspondant à son activité principale de chercheur en physique subatomique et en cosmologie. Je souhaiterais que sa philosophie de la science physique, sa conception épistémologique, imprègnent sa production scientifique. 

Je m’interroge sur les précautions d’Aurélien lorsque notamment il rappelle que la science (sic) devrait être en tout cas toujours consciente de ses limites qui sont pour lui omniprésentes. Premièrement, il ne peut pas faire référence à la science comme si elle était une personne. Quelle serait la nature de cette entité qui serait, selon son expression, autonome, douée d’une quelconque conscience propre ? Cela est un non-sens. Cela est étonnant de sa part. Pourquoi ne dit-il pas : les physiciens devraient être toujours conscients des limites de leurs raisonnements scientifiques ? Je crains que cette esquive signifie qu’il sait depuis longtemps que les physiciens refusent de relativiser à l’échelle de l’humain la signification de leurs découvertes qui ne seraient dans ce cas que provisoires. La communauté des scientifiques en physique fondamentale se considère comme étant l’avant-garde du savoir, on ne peut s’attendre à ce que, d’eux-mêmes, ils sabordent leur piédestal. Aurélien estimerait qu’il ne peut pas se particulariser. En tous les cas il considère que la situation n’est pas favorable et peut-être n’a-t-il pas les moyens irréfutables de proposer à la communauté scientifique un regard neuf pour provoquer un minimum d’adhésion à l’idée que « nos manières d’appréhender cet « autre part » n’en demeurent pas moins humaines et créées », et donc intégrer les spécificités de l’être humain tel qu’il est aujourd’hui - être humain encore aveuglé par des déterminations pas encore gommées, inhérentes à notre condition - dans le corpus de la science physique.

Je remarque qu’il n’est pas le seul à tenter des coups de projecteur qui, s’ils étaient retenus, pourraient changer le cours de la création scientifique. Ce qui ne manque pas de m’interpeler c’est que, réparti dans le temps et en tenant compte de la variété de la répartition géographique des centres de recherches, de tels sursauts de lucidité peuvent être régulièrement exprimés et enregistrés mais malheureusement autant que j’ai pu le constater ils ne s’additionnent pas, ils n’impriment pas, ils ne catalysent pas au sein de ladite communauté. Au bout du compte ils ne sont que des miroitements de lucidité, pas plus. Ainsi, j’ai pu lire dans un article du 9/01/2019 dans ‘Nature’ : « It’s also to embrace the hope that we can create a new scientific culture, in which we see ourselves both as an expression of nature and as a source of nature’s self-understanding. We need nothing less than a science nourished by this sensibility for humanity to flourish in the new millennium” » ; soit : « Il faut aussi embrasser l’espoir que nous pouvons créer une nouvelle culture scientifique, dans laquelle nous nous considérons nous-mêmes à la fois comme une expression de la nature et comme une source de l’auto-compréhension de la nature. Nous avons besoin de rien de moins qu’une science nourrie par cette sensibilité pour que l’humanité s’épanouisse dans le nouveau millénaire. »

L’article a pour titre : ‘La tache aveugle’ ; soit : ‘The blind spot’ avec le sous-titre : « Il est tentant de croire que la science nous donne une vue de la réalité telle que vue par l’œil de Dieu. Mais nous oublions, à notre péril, la place de l’expérience humaine. » ; soit : « It’s tempting to think science gives a God’s-eye view of reality. But we forget the place of human experience at our peril.” Depuis, je n’ai jamais eu l’occasion de constater qu’il ait été cité. Or, c’est le nombre de citations d’un article qui fait référence parmi les scientifiques pour mesurer la curiosité et l’intérêt provoqué par un article.   

Cet article, dans lequel j’ai rencontré de nombreux et sérieux points de vue vraiment concordant, m’a insufflé l’envie de correspondre avec les trois auteurs. L’un : professeur d’astrophysique, l’autre physicien théoricien et le troisième : professeur de philosophie.  Mais ce fut sans retour. J’aurais voulu que l’on développe sur ce qui ne fait aucun doute pour moi : « l’objectivité scientifique ne peut être confondue avec l’idée d’une compréhension extérieure ; dans ce contexte, « objectif » signifie simplement quelque chose qui est fidèle aux observations convenues par une communauté d’enquêteurs utilisant certains outils. La science est essentiellement une forme d’expérience humaine hautement raffinée, basée sur nos capacités à observer, agir et communiquer. L’affirmation selon laquelle la science révèle une « réalité » parfaitement objective est plus théologique (sic) que scientifique. »

Citons aussi S. Hawking et Mlodinov : « Nous modélisons la réalité physique à partir de ce que nous voyons du monde, qui dépend de nous et de notre point de vue. Dès lors, un « réalisme dépendant du modèle » semble préférable au réalisme absolu habituel en physique » … « Dans ces doctrines, le monde que nous connaissons est construit par l’esprit humain à partir de la matière brute des données sensorielles, et il est mis en forme par le cerveau. Ce point de vue semble difficile à accepter (sic), mais pas à comprendre. S’agissant de notre perception du monde, il n’existe aucun moyen de supprimer l’observateur – c’est-à-dire nous. »

             La suite du chapitre Prologue sera publié le 10/06.

[1]Pour indiquer à quel point avec mon hypothèse, j’invite à aller prospecter le monde de la physique sur un territoire toujours en friche, je cite dans un article des plus récents, soit le 19 mai 2022, la philosophe de la physique Elise Crull, au City College de New York, qui nous rappelle : “Entanglement, superposition, decoherence—it’s all very puzzling from a metaphysical perspective. Even after 100 years, we still debate what is “real” in the quantum realm.”

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