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26 septembre 2015 6 26 /09 /septembre /2015 13:29

Non, on ne pense pas quantique. Pas encore !

Etant donné ce que j’ai écrit p.4 dans l’article du 19/08 : ‘Fondamentalement : Renoncer’, je fus alerté lorsque j’ai découvert que le mensuel ‘Science et Vie’ d’octobre annoncé en couverture, d’une façon affirmative et au présent : ‘On pense tous quantique’. Or ce que j’ai exprimé le 19/08 est un futur avec l’idée suivante : ‘Cet encore indique qu’il faut accepter l’idée que le sujet pensant évolue et évoluera et qu’ainsi : ‘penser quantique’ pourra devenir progressivement, quelque peu, plus naturel. Personne ne saurait dire, encore combien de générations (2, 3 ou 1 ou 10 ?), mais en effet on peut être assuré que cette conquête intellectuelle en marche doit avoir en retour une influence sur notre culture scientifique collective et partant induire une intelligibilité de plus en plus affûtée de ce qui est de l’ordre du quantique. Au sens propre du terme, notre bagage intellectuel s’enrichit et la pratique du raisonnement propre à la mécanique quantique dans des domaines de plus en plus variés ne peut que progressivement nous accoutumer et rendre plus naturel une pensée quantique.’

Dans ce genre de situation, ne renonçons pas à un peu d’humour en mettant en relief que à peine 2 mois séparant mon article et la première de couverture de la revue ne peuvent être confondus avec : 2, 3 ou 1 ou 10 générations. Mais les circonstances sont ainsi, une génération c’est toujours de l’ordre de 25 ans et non quelques semaines, heureusement que j’ai pris les devants à 2 mois près. Alors que penser de cette annonce à propos de la cognition quantique ? Il faut que chacun se fasse une opinion propre en lisant le N° d’octobre. Quant à moi, je considère que les travaux de S. Dehaene sont la bonne référence pour rendre compte de la richesse et de la complexité du fonctionnement cérébral du sujet pensant qui cogite (voir article du 2/11/2012 : ‘Thomas Bayes dans le cerveau’, celui du 01/01/2013 : ‘Un Monde en Présence II’ et celui du 14/10/2014 ‘Stanislas Dehaene et suite.’).

Nous ne sommes qu’aux prémices de la compréhension de ce qui se passe dans le cerveau quand le sujet pensant cogite et vouloir proposer des explications de types quantiques est clairement précipité, abusif, elles sont le fruit d’extrapolations et d’interprétations qui ne peuvent qu’être erronées. Pour résumer et avec ironie on pourrait dire : « Ce n’est pas parce que c’est multiple et complexe que cela est automatiquement quantique. Il ne faut molester ni notre cerveau ni la mécanique quantique. »

Je reste convaincu que dans la durée nous serons à même de décrypter d’une façon de plus en plus pertinente les propriétés fondamentales de la mécanique quantique et que, au moins, certains de ses postulats pourront être dénoués et deviendront directement explicites, sans pour autant qu’il y ait une cognition quantique qui soit obligatoirement à l’œuvre. Cette évolution est à mettre au compte de notre apprentissage de la mécanique quantique depuis un siècle, des succès de celui-ci, de l’enregistrement et in fine de l’adoption de ses spécificités par ceux qui plus spécifiquement la pensent, de l’accoutumance de plus en plus large de ses applications. Grâce à l’éducation profonde qui est en cours, grâce à l’évolution culturelle technologique, il en résulte et il continuera d’en résulter un enrichissement évolutif de notre cerveau et penser quantique devient et deviendra progressivement, quelque peu, plus naturel.

A côté des articles qui se veulent démonstratifs d'une soi-disant cognition quantique, il y a un article interview de M. Bitbol : directeur de recherche au CNRS (historien de la physique quantique et philosophe de la connaissance.) Il dit que « la mécanique quantique est une théorie générale (sic) de la connaissance, qui concerne toutes sortes d’objets et toutes sortes de domaines… » Non pas, répondrais-je car elle est toujours une théorie pragmatique, empirique, qui a été élaborée, au fur et à mesure, pour rendre compte de connaissances iconoclastes (quand on se réfère à la physique classique) mises en évidence lorsque l’intelligence humaine a acquis les moyens de progressivement prospecter le monde matériel infiniment petit.

Les réponses de Bitbol aux questions de l’interview sont accompagnées d’une succession de franchissements de Rubiconds du type : « Mais cet écart majeur entre les sciences de la nature et les sciences de l’homme disparaît (sic) presque entièrement avec la physique quantique, où on ne peut plus établir de séparation nette entre les propriétés des objets et l’effet que produit l’instrument servant à les mesurer.»

Je partage les commentaires de M. Bitbol, lorsqu’il s’agit d’évoquer l’histoire de l’avènement de la mécanique quantique ainsi que les commentaires à l’endroit des fondateurs de l’école de Copenhague mais malencontreusement, il exploite ceci pour affirmer une conviction systématique qu’il ne justifie pas : « Cette situation est semblable à celles des sciences humaines (sic), et il n’y a plus rien d’étonnant à ce que des propriétés analogues y soient observées. »

Ces différentes critiques et observations m’amènent à considérer que l’article du 18/03/2015 : « Décrypter la physique comme science de l’interface de l’être humain et de la Nature » est approprié car cela situe correctement le positionnement de la contribution de ce qui est de l’ordre de l’humain en ce qui concerne la production d’un savoir sur la Nature sans qu’il y ait le moindre amalgame possible. Dans cette situation, la distinction entre sciences de la nature et sciences de l’homme est claire tout en rappelant que les connaissances sont le fruit des cogitations humaines et produire des nouveaux savoirs fondamentaux de la nature c’est corrélativement mettre en évidence de nouvelles facultés ou de nouvelles aptitudes de l’être pensant.

Parmi ces aptitudes, il y a celle que je nommerai : ‘humilité tactique et savante’. Pour illustrer mon propos, je reprends l’exemple, déjà cité, des états d’âme de H. Lorentz qui un jour de la semaine, enseignait en physique classique que l’électron dans un mouvement circulaire rayonnait de l’énergie et quittait sa trajectoire, et l’autre jour de la semaine, enseignait que l’électron de l’atome d’hydrogène était parfaitement stable. La parade qui fut proposée par les initiateurs de la mécanique quantique a consisté à prendre du recul et de ne prendre en compte que l’atome d’hydrogène en tant qu’objet quantique et de le caractériser par son état : d’énergie, par exemple. Finis les états d’âme de H. Lorentz, puisqu’on a pris un recul intellectuel suffisant pour ne plus avoir à se préoccuper du ou de l’absence de rayonnement de l’électron. En évacuant ce problème insoluble, l’observateur se place dans une nouvelle situation favorable car avec le mot état quantique il y a l’idée de permanence, de stabilité, de constance, bref il faut du temps pour que l’observateur reconnaisse et déclare : l’objet est dans un état quantique. Ce terme, donc cette prise de position, est un pis-aller, le fruit d’un renoncement nécessaire à propos du comportement physique de l’électron mais aussi un gain tactique car il est bien connu qu’un physicien peut reprendre la main, peut dire quelque chose sur des objets lorsqu’il y a de l’invariance, de la constance, et c’est impératif.

En conséquence, cette modestie-là, ce provisoire (qui a commencé il y a un siècle), Einstein aurait peut-être pu l’accepter si ce provisoire lui avait été proposé par Bohr ou d’autres collègues. Qui sait !

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