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23 juin 2018 6 23 /06 /juin /2018 11:52

Cela s’allume beaucoup plus tôt que prévu.

Premières étoiles

Fin février, un article annonce que des astronomes auraient détecté des signaux caractéristiques correspondant à l’émission de lumière des toutes premières étoiles en activités peu après la naissance de l’univers, c’est-à-dire 180 millions d’années après le big bang. Ces tous premiers astres désignés : étoiles de la « population III »[1], constitueraient, si cela est confirmé, un véritable Graal scientifique.

            Ce qui est aussi remarquable c’est l’instrument de détection employé par l’équipe de Judd Bowman : une petite antenne (EDGES) située dans le désert Australien à l’abri de longueurs d’ondes parasites et sensible à la réception de l’onde radio de l’ordre de 3,8 m correspondant à la longueur d’émission de 21 cm rayonnée, à l’origine de la formation de l’étoile, par l’hydrogène ambiant ionisé (redshift de l’ordre de 20). Ce résultat est obtenu après 12 années d’efforts de recherche.

            Ce qu’il faut retenir avec ce premier résultat c’est qu’il n’est pas en accord avec le modèle théorique de la cosmologie car dans ce cadre, la température du gaz primordiale prédite par ce modèle (6°K) est encore trop élevée pour qu’il y ait accrétion du gaz primordial sous l’effet de l’interaction gravitationnelle. L’observation obtenue par J. Bowman et son équipe nous conduit à inférer qu’à cet âge de l’univers la température est deux fois plus faible soit 3°K. Ainsi, dès lors que le résultat de J. Bowman sera confirmé il faudra que le modèle théorique de la cosmologie soit notablement revisité.

            A la mi-Mai, une observation convergente est publiée. L’article en question annonce avoir détecté des étoiles formées 250 millions d’années après le big bang. L’existence de ces étoiles, annoncée par une équipe japonaise, est certes indirecte mais digne du plus grand intérêt car elles sont inclues dans une galaxie qui aurait 500 millions d’années. Et celle-ci a été observée par le télescope Hubble puis par Alma. Les traces d’oxygène dans la jeune galaxie permettent de dater les premières étoiles comme cela est annoncé.

            Premières galaxies.

La date réelle de la formation des premières galaxies est tout autant très différente de celle qui est théorisée (a priori on prévoit qu’il faut entre 500 millions et 1 milliard d’années pour qu’une galaxie se forme). Après observation, grâce à des télescopes de plus en plus performant, il est maintenant estimé que les plus petites (basiques) galaxies pourraient se former dès 300 millions d’années post big bang. Les premières observées datées rigoureusement, le sont à 550 millions. Grâce à Alma[2], il fut observé des galaxies beaucoup plus massives que prévues et plutôt récentes car datées à 780 millions d’années. Ce résultat a été publié en décembre 2017, (revue Nature), indiquant aussi qu’au sein de ces galaxies le taux de formation de nouvelles étoiles par an est de l’ordre de 2900 masses solaires. Ces galaxies très actives (puisque par comparaison dans notre galaxie, actuellement, il se forme à peu près 1 à 2 étoiles par an) contiennent une masse de gaz (hydrogène et lithium…primordial) estimée à 270 milliards de fois la masse du soleil et une masse de poussière (forgée par les étoiles de la génération précédente) estimée à 3 milliards de fois la masse du soleil. Comme s’exclame un des auteurs de l’article : « C'est une extraordinaire énorme quantité de poussière, compte tenu du jeune âge du système ! »

Premiers amas de galaxies

Des observations récentes de l'Univers lointain ont révélé deux amas de galaxies qui se seraient formés il y a plus de 12 milliards d'années, à une époque où l'on pensait que de telles structures n'avaient pas eu le temps de se créer. De quoi bouleverser les certitudes des astrophysiciens. Ces deux embryons d'amas galactiques, des proto-amas formés respectivement de quatorze et dix galaxies en train de fusionner, ont été repérés quand l'Univers n'était âgé que de 1,4 milliard d'années pour le premier, et I,5 milliard d'années pour le second. Soit nettement plus tôt que prévu puisque jusqu’à présent, les astronomes pensaient, avec le modèle théorique, que ce phénomène se produisait 3000 millions d’années après le big bang. En effet le modèle actuel prévoit que ce type d’amas très massif a besoin de beaucoup plus de temps pour évoluer.

            Nous observons directement que les premières étoiles s’allument beaucoup plus tôt que cela est théorisé. Nous constatons que les galaxies se forment beaucoup plus tôt qu’imaginé par le modèle standard et en plus celles-ci se regroupent pour former les premiers amas en une durée deux fois inférieure à celle théoriquement programmée. Ces constatations ne tarissent pas pour autant les raisons de réviser profondément la conception la plus en cours de l’émergence de l’univers en un big bang qui à partir de cet instant se déploierait et se structurerait.

            Grâce aux moyens d’observations de plus en plus technologiquement sophistiqués qui sont à l’œuvre actuellement et en prévision de ceux dont nous disposerons dans un futur proche, nous découvrons dans l’univers primordial d’autres objets célestes dont les caractéristiques sont phénoménales  et théoriquement totalement imprévisibles, ainsi en est-il des Quasars.

Premiers Quasars

            En décembre 2017, il a été publié le résultat de l’observation d’un trou noir supermassif le plus lointain (publication en décembre 2017), jusqu’à présent jamais observé. Le trou noir est situé au centre d’un quasar[3] très brillant et la lumière émise nous permet de le situer à 690 millions d’années après le big bang. Le trou noir est estimé à 800 millions de fois la masse de notre soleil et les caractéristiques font de ce quasar une anomalie dans l’univers primordial.

            A la mi-mai, des chercheurs australiens ont publié le résultat d’une observation phénoménale, il s’agit d’un quasar qui en son cœur gîte un trou noir dont la taille est estimée être de l’ordre de 20 milliards de masse solaire (sic) et il se situe à un peu plus d’un milliard d’années après le big bang. Chaque deux jours il accrète l’équivalent d’une masse solaire ce qui fait qu’il s’accroît d’un pour cent chaque million d’années.

            Un des découvreurs de cet objet phénoménal précise : « Ces énormes trou noir avec une croissance si rapide sont excessivement rares et nous l’avons cherché pendant de nombreux mois. Le satellite européen Gaia, qui mesure les très petits mouvements des objets célestes nous a beaucoup aidé à trouver ce trou noir supermassif… Nous ne savons pas comment celui-ci a pu grossir autant et si rapidement dans les premiers temps de l’Univers. »

            Toutes ces données que j’ai sélectionnées ci-dessus ont été publiées ces six derniers mois. A priori aucunes ne cadrent avec le modèle théorique standard cosmologique. Toutefois, beaucoup de cosmologistes pensent qu’il est trop tôt pour dire que ce modèle standard est définitivement caduc. En effet, il est encore supposé que ces nouvelles données pourraient provoquer, certes, de très sérieux ajustements sans qu’il soit pour autant obligatoire de l’abandonner comme modèle de référence.

            Le modèle standard a été conçu principalement grâce à l’obtention de la première image de l’univers offerte par le fond diffus cosmologique 380 000 ans après le big bang. Il a été considéré que cette première image contenait toute l’information nécessaire et suffisante pour imaginer et décrire ce qui s’est produit avant la formation de cette image depuis le big bang puis décrire et ajuster en fonction de ce que l’on était en mesure d’observer après 380 000 ans grâce à toute la panoplie de nos instruments.

            Il est certain que cette première image a la valeur d’un vaste filet de connaissances qui nous a permis de saisir et décrypter des informations essentielles qui pendant 30 années ont été exploitées avec le bénéfice que l’on reconnaît mais l’erreur qui coure maintenant c’est de croire que les mailles du filet sont suffisamment serrées pour contenir toute l’information. Disposer d’un modèle de référence constitue un confort intellectuel collectif de premier ordre pour enrichir notre compréhension de l’univers mais il ne doit pas nous aveugler et provoquer une inertie intellectuelle collective.

            Un bel et malheureux exemple de cette certitude aveuglante nous est proposé avec l’article publié le 19/06 par Techno-science : « Le modèle cosmologique le plus simple de nouveau favorisé ? » (En copie ci-dessous). Tout ce que j’ai présenté comme étant autant de nouvelles indications qui pourraient remettre en cause le schéma classique est parfaitement ignoré. L’équipe de Planck continue de travailler sur la même base de données qui a été collectée par le satellite en 2013 et montre qu’elle est imperméable à des bases d’informations plus récentes. Elle ne s’interroge pas sur le fait qu’elle se retrouve en accord avec son premier scénario ni qu’elle puisse tout simplement induire ce scénario parce que sa base est loin d’être exhaustive. Il est remarquable qu’elle évalue en terme de quantités sans prendre en compte la dimension temporelle de la formation des objets célestes qu’elle prend en référence alors que l’on découvre que la chronologie de la formation de chacun de ces niveaux structurels s’avère être une bonne raison de remettre l’ouvrage sur le métier.

Le modèle cosmologique le plus simple de nouveau favorisé ?

En 2013, les résultats de Planck ont mis en évidence pour la première fois un désaccord entre les paramètres cosmologiques déterminés par le fond diffus cosmologique et ceux obtenus en analysant l'abondance des amas de galaxies détectés par Planck. Celui-ci est confirmé lors de la seconde analyse de Planck en 2015 ainsi que par des analyses indépendantes impliquant l'utilisation du lentillage gravitationnel ou d'amas de galaxies observés dans le domaine des rayons X. Des chercheurs ont montré, à la lumière d'une nouvelle analyse, que le fond diffus cosmologique et l'abondance des amas de galaxies observés par Planck convergent vers le modèle cosmologique standard le plus simple, dominé par la matière noire froide et une constante cosmologique.
Le fond diffus cosmologique et l'abondance des amas de galaxies permettent de mesurer les paramètres cosmologiques aussi bien indépendamment qu'en
combinaison. Jusqu'en 2013 et les premiers résultats de Planck, le nombre d'amas de galaxies utilisables pour des analyses cosmologiques était trop faible. Les mesures des paramètres cosmologiques déduites étaient donc entachées de grandes barres d'erreurs et donc peu fiables. En 2013 et grâce à environ 200 amas de galaxies observés par le satellite Planck, une mesure précise des paramètres cosmologique a été possible montrant un désaccord entre les paramètres cosmologiques déterminés par le fond diffus cosmologique et ceux obtenus en analysant l'abondance des amas de galaxies. Il portait notamment sur la mesure de la densité de matière dans l'univers et sa distribution aux très grandes échelles. Ce désaccord a été confirmé lors de la second analyse de Planck en 2015, utilisant près de 500 amas de galaxie, ainsi que par des analyses indépendantes basées sur l'utilisation du lentillage gravitationnel ou d'amas de galaxies observés dans le domaine des rayons X.

Une telle différence ne pouvait avoir que deux origines possibles: soit la
masse des amas observés était fausse d'un facteur deux, une hypothèse irréaliste étant donné l'état de l'art sur la compréhension des amas de galaxies, soit le désaccord était le signe d'un écart au modèle cosmologique le plus simple.


En 2016, Planck a publié de nouveaux résultats d'analyse du fond diffus cosmologique révisant notamment le paramètre cosmologique lié à la formation des premières étoiles dans l'univers. Dans une étude parue dans Astronomy & Astrophysics Journal, une équipe de chercheurs a effectué une re-analyse approfondie. Elle a utilisé ces nouvelles données dans une analyse complète combinant le fond diffus cosmologique, l'abondance des amas mais aussi leur fonction de corrélation angulaire sur tout le ciel. Cette nouvelle étude montre que le désaccord entre le FDC et les amas de galaxies est fortement réduit.
L'équipe a exploré des écarts au modèle cosmologique le plus simple, comme l'ajout de neutrinos massifs ou une composante d'
énergie noire différente de la constante cosmologique. Cette analyse montre qu'aucune de ces deux extensions au modèle cosmologie "standard" ne permet de résoudre le faible désaccord restant, qui doit encore être étudié et expliqué.
Le modèle cosmologique le plus simple avec l'époque de formation des premières étoiles nouvellement déduite de Planck, qui permet un meilleur accord entre le fond diffus cosmologique et l'abondance des amas de galaxies, semble donc favorisé.

 

 

[1] Les étoiles qui se forment à notre époque, dans l’univers local, sont de la « population I »

[2] Alma : Radiotélescope formé d’un réseau pouvant associer jusqu’à 66 antennes amovibles situé au Chili à 5500 mètres d’altitude. Il produit des images interférométriques d’une grande précision dans la gamme des ondes millimétriques.

[3] Un quasar (quasi star) est une galaxie très énergétique avec un noyau actif (AGN : active galactic nucleus ou NAG : noyau actif galactique). Les quasars sont les entités les plus lumineuses de l'univers. Un quasar est la région compacte entourant un trou noir supermassif au centre d'une galaxie massive.

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